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Un bel extrait de... Les Raisins de la colère

  • Charlotte Gobeaut
  • 26 févr. 2017
  • 3 min de lecture

Récompensé par le prix Pulitzer en 1940, Les Raisins de la colère est le chef-d'oeuvre, si l'on peut dire, de J. Steibeck. En suivant la famille Joad jusqu'en Californie, le lecteur s'engouffre avec avidité dans le contexte de la Grande Dépression, événement marquant de la crise de 1929 aux États-Unis. Contrainte de quitter son Oklahoma natal, la famille s'apprête à prendre la route de l'Ouest, le grand inconnu de l'époque, avec l'espoir d'y trouver un travail et, plus que tout, un nouveau chez-soi, loin des difficultés économiques et de l'injustice sociale qui régnaient alors. L'extrait suivant, en plus de faire état de la langue exquise de Steinbeck, offre un moment clé de l'oeuvre en faisant directement écho au titre, le tout dans une singulière montée en puissance.


[Traduction en français plus bas]


« There is a crime here that goes beyond denunciation. There is a sorrow here that weeping cannot symbolize. There is failure here that topples all our success. The fertile earth, the straight tree rows, the sturdy trunks, and the ripe fruit. And children dying of pellagra must die because a profit cannot be taken from an orange. And coroners must fill in the certificate – died of malnutrition – because the food must rot, must be forced to rot.


The people come with nets to fish for patatoes in the river, and the guards hold them back ; they come in rattling cars to get the dumped oranges, but the kerosene is sprayed. And they stand still and watch the potatoes float by, listen to the screaming pigs being killed in a ditch and covered with quick-lime, watch the mountains of oranges slop down to a putrefying ooze ; and in the eyes of the people there is the failure ; and in the eyes of the hungry there is a growing wrath. In the souls of the people the grapes of wrath are filling and growing heavy, growing heavy for the vintage. »


[Traduction en français par Marcel Duhamel et M.-E. Coindreau]


« Il y a là un crime si monstrueux qu'il dépasse l'entendement. Il y a là une souffrance telle qu'elle ne saurait être symbolisée par les larmes. Il y a là une faillite si retentissante qu'elle annihile toutes les réussites antérieures. Un sol fertile, des files interminables d'arbres aux troncs robustes, et des fruits mûrs. Et les enfants atteints de pellagre doivent mourir parce que chaque orange doit rapporter un bénéfice. Et les coroners inscrivent sur les constats de décès : mort due à la sous-nutrition – et tout cela parce que la nourriture pourrit, parce qu'il faut la forcer à pourrir.


Les gens s'en viennent armés d'épuisettes pour pêcher les pommes de terre dans la rivière, et les gardes les repoussent ; ils s'amènent dans leurs vieilles guimbardes pour tâcher de ramasser quelques oranges, mais on les a arrosées de pétrole. Alors ils restent plantés là et regardent flotter les pommes de terre au fil du courant ; ils écoutent les hurlements des porcs qu'on saigne dans un fossé et qu'on recouvre de chaux vive, regardent les montagnes d'oranges peu à peu se transformer en bouillie fétide ; et la consternation se lit dans les regards, et la colère commence à luire dans les yeux de ceux qui ont faim. Dans l'âme des gens, les raisins de la colère se gonflent et mûrissent, annonçant les vendanges prochaines. »


Les Raisins de la colère, John Steinbeck (Gallimard)

 
 
 

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